Les drôles de têtes ouest
de la collégiale Saint-Pierre d'Appoigny
Avant que les pierres de notre vieille collégiale ne disparaissent sous les échafaudages des restaurateurs, il nous a paru intéressant d'y faire une dernière visite, dextrogyre comme il se doit, autour de ce vénérable monument, bâti il y a huit cent ans.
Intéressant car si le spirituel et le religieux résident à l'intérieur de la collégiale, l'extérieur, à contrario, ne montre que des figures profanes. Profanes représentant tous les contemporains de cette aventure que fut la construction de notre plus vieille batisse éponienne.
Quel meilleur moyen que la sculpture pour transmettre à tous, illettrés compris, la mémoire durable de ce magnifique chantier.
Nous, qui baignons pourtant dans la culture de l'image, ne savons pas toujours lire ce que les imagiers du XIIIe siècle nous ont transmis par la sculpture.
Contrairement à l'habitude que nous avons de passer devant la collégiale en voiture ou à pied, les yeux baissés, arrêtons-nous aux points cardinaux de l'édifice et employons-nous à déchifrer ce qui se cache sous la mousse des pierres.
Partant du centre du village, commençons la visite
par l'angle sud-ouest de l'église.
La fenêtre sud-ouest.
La première fenêtre est encadrée par la mise à l'honneur de deux personnages qui, si l’on considère leur coiffure, sont de haut rang. Ceux qui, très certainement, ont autorisé la construction.
Couronne de comte 13e siècle
Taillées dans un élément de l’appareillage, les têtes sont en préparation depuis le départ du chantier.
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Le portail.
L’axe du portail principal a été déporté par rapport à la verrière, de façon à laisser un espace suffisant pour un escalier menant à une tribune d’orgue qui a peut-être été détruite lors des Guerres de Religion.
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La verrière.
La verrière fait honneur au végétal, une des principales sources de revenus des habitants et matériau de choix pour les deux charpentiers "homme végétal", "homme vert" ou "bois debout", encadrant les fenêtres .
Folio 10 du Carnet de Villard de Honnecourt (vers 1230), Paris, Bibliothèque nationale de France
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La porte des vignerons ?
La partie la plus délabrée de la façade.
Le fronton de la petite porte fait plus précisément honneur aux vignerons. La vigne au XIIIe siècle prenait une part importante de l'agriculture locale, d'autant que la vente des surplus était facilitée par la proximité de la route et de la rivière d'Yonne.
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La fenêtre nord-ouest
A l'instar de leur voisines du sud, les têtes, également couronnées, paraissent moins nobles, plus caricaturales et peut-être plus masculines que les précédentes.
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Les pinacles
Après le labourage vient le paturage.
Au vu de tous, la façade principale rappelle aux habitants la principale source de revenus de la dîme, en principe dixième partie, des produits de la terre et de l'élevage versée à l'Église
Veaux, vaches, cochons, couvées :
Au nord ouest
Au sud ouest
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L'étrange se poursuit plus haut sur
Le pignon ouest
Parmis d'innombrables fleurs de pierre,
la frise latérale sud cache une tête à l'expression sereine
Le nord par contre,
nous livre un personnage visiblement torturé.
Enfin, au faîte du pignon, sous la croix.
Ce monstre menaçant, au nez crochu est peut être une Grylle, selon la nouvelle mode de 1215. Dans l'art antique, les grylles (ou grylloi, ou gryllos) sont des figures grotesques ou monstrueuses représentées sur divers supports. "une série de créatures étranges, ignorées ou peu connues au XIIe siècle, qui se constitue et se répand dans l'imagerie gothique" au début du XIIIe siècle.
Jurgis Baltrusaitis, Le Moyen Âge fantastique, p.13, Armand Colin, 1955.
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Nous poursuivrons la découverte des drôles de têtes de la collégiale
en 2023,
année que les Amis de la Collégiale vous souhaitent
pleine de santé et de satisfactions intellectuelles.
