Le caquetoire dont on parle.
Car c’est bien de parler dont il est question.
Les dictionnaires généraux du XVII au XXe siècle, eux, n’en parlent pas :
ni Trévoux, ni Larousse, ni Littré, ni Robert.
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En 1997, Marcel Lachiver dans son Dictionnaire du monde rural, les mots du passé, Fayard, nous en donne deux définitions :
Caquetoire : substantif féminin :
- Chaise basse à dos très élevé et parfois sans bras, que nous nommons causeuse, et qu’on appelait aussi caqueteuse, au XVIIIe siècle
- Petite barre de bois ou de fer placée entre les mancherons d’une charrue pour les tenir écartés.
Ne nous étonnons donc pas de voir parler le laboureur à son cheval,
le buste appuyé sur le caquetoire de sa charrue.
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En 2016, Alain Rey, dans son dictionnaire historique de la langue française, aborde le sujet en passant par :
Caqueter v. intr. : indirectement attesté dès 1320 par caqueteresse « femme bavarde ».
Caqueteur : n. et adj. : (1507) caractérise une personne qui bavarde de manière intempestive.
Et enfin
Caquetoire : n. f. : (1522) a désigné un type de siège à dossier haut, commode pour la conversation.
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Le nom de Caquetoire tient plus du patois que du Français. Il serait régional et populaire, venant du Bourbonnais, le caqu’touère. Utilisé vraisemblablement au milieu du XXe siècle par des écrivains régionaux voulant patoiser, il fustige le bavardage des fidèles avant et après les offices à l’église.
Le mot a fini par intégrer le Français et devint une référence architecturale pour les églises rurales. C’est le nom que l’on a fini par donner à l’auvent attenant à l’entrée de l’église.
En Bretagne, où les traditions religieuses persistent, on se souvient encore que les membres du conseil de Fabrique se réunissaient sur le banc caquetoire de l’auvent, sous les statues des Apôtres.
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Le caquetoire est une construction généralement en pierre, sorte d’appentis, plus souvent avec des murs sur trois côtés, s’appuyant sur la façade, principale ou latérale, de l’église, et comportant des baies et des piliers.
La forme la plus sommaire est un simple auvent, reposant sur des piliers de bois, parfois isolé de l’humidité par des plots de pierre. En fait le caquetoire est un porche, un préau, une mini-galerie dans le meilleur des cas.
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En son temps Appoigny avait son caquetoire.
En 1875, Séraphin-Frédéric Mieusement, qui démarrait sa carrière de photographe des monuments historiques, est passé par Appoigny. On lui doit l’unique photo de notre ancien caquetoire qui n’avait pas encore été démoli par les artisans de la restauration.
Démolition du caquetoire.
Entrée sud après travaux
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Mais notre défunt caquetoire n’avait pas la seule vocation de protéger le bavardage des fidèles. Il avait aussi l’utilité de protéger les boiseries de l’entrée sud.
Depuis 1875, soit 147 ans après la démolition, les intempéries ont fait leur œuvre de destruction et malgré une récente peinture, les portes nécessitent une meilleure sauvegarde.
Conscient de cette nécessité notre architecte en chef n’a pas trouvé mieux que de nous proposer un auvent en tôle du plus mauvais effet qui, s’il s’avère effectivement efficace, défigurera l’architecture médiévale de notre collégiale.
Mais les travaux, à ce stade, ne sont pas encore engagés.
Gageons qu’une meilleure solution verra le jour.
En attendant, cet auvent aura au moins le mérite
de nous faire caqueter utilement.
A suivre...