Bernard, Fiacre, Pierre
ou le syndrome* de Paul
*Syndrome : malaise à répétition
De Bernard à Fiacre
Un document d’archive précieux pour notre histoire, nous parle de l’hôpital d’Appoigny :
“Mémorial pour monseigneur l’Illustrissime evesque d’Aucerre, seigneur spirituel et temporel d’Eppougny, concernant l’État de l’hôpital de Sainct-Bernard d’Eppougny, lieudict Vauzouailles”.
Ce mémorial était destiné à alerter les autorités du délabrement de l’établissement sis :
“dans le faulzbourg d’Eppougny, sur le grand chemin d’Aucerre à Paris, près le grand cimetière”.
Arch. Dép. Yonne - Quatrième partie du plan de Régennes et d'Appoigny. 1771. G1703-4
L’établissement, construit quelques années avant notre Collégiale, sera géré par les religieux hospitaliers de Saint-Bernard de Mont-Jou (Mont-Jovis) en Savoie, dépendants de la plus proche fondation de l’ordre à Montréal, près Avallon. Il aura pour vocation de soigner et d'héberger gratuitement les pauvres et les passants.
Les religieux assureront ce service sans discontinuer, jusqu'au XVIIe siècle. A cette fin, ils disposaient d’une petite chapelle, attenante à l'hôpital et qui était consacrée à Saint Bernard de Menthon, créateur de l'ordre mais ignoré de la population maraîchère qui en avait arbitrairement attribué le patronage de leur saint patron, Saint Fiacre.
Le prieur local avait coutume "le jour de la Saint Fiacre, de venir faire l'office en cette chapelle", d'y percevoir "les offrandes qui se font audit jour soubz prétexte d'une image du dit Sainct-Fiacre posée sur l'autel et desdittes offrandes se faict traitter en un cabaret prochain..." et ceci malgré les remontrances de son évêque, il continua
"a toujours célébrer insolemment tous les ans en ceste chapelle, le jour de la Saint Fiacre ; grande messe et vespres et toujours pris et perçu les offrandes effrontément."
Les offrandes maraîchères eurent raison du vocable et l’emportèrent devant l’évêque.
En 1765, le géographe Pasumot décrit notre cité en ces termes :
"L'antiquité d'Appoigny (eponiacum), titre ville, jadis murée et dont le principal cimetière est sur la grand route ainsi que plusieurs maisons séparées, nommées le faubourg, près duquel et sur la route même est une ancienne chapelle sous l'invocation de Saint-Fiacre..."
Aujourd’hui l’image du jardinier a été affichée à l’abri du jubé, dans la collégiale. Quant à la statue de l’hospitalier de Saint-Bernard, la malice populaire l’a officiellement débaptisée.
De Pierre à Paul
Il aurait été utile que Pasumot s’intéressât à l’église d’Appoigny, mais il se contenta de la description des abords de la voie romaine d’Auxerre à Sens. Nous avons heureusement les archives départementales et municipales de la collégiale qui nous montrent une période, de 1685 à 1862, où l’emploi de la dédicace d’origine s’avère régulièrement usitée.
En cette seconde moitié du 19e siècle se développent des courants d’idées qui débordent l’anticléricalisme et manifestent un retrait du religieux dans la société. Appoigny n’est pas en reste avec ce phénomène et il faudra beaucoup d’énergie à la famille d’Hyppolite Ribière et à son entregent pour décider la Municipalité de l’époque à constituer un dossier de restauration de la collégiale. Dossier dont les intitulés se cantonneront soigneusement à la simple :
Église d’Appoigny.
A cette époque un érudit distingué nous arrive de la Côte d’or pour se fixer à Auxerre. Diplômé de l’école des chartes de Dijon, il est archiviste paléographe et devient archiviste départemental de l’Yonne. Max Quantin sera également directeur de la bibliothèque d’Auxerre.
Ses fonctions lui permettent de faire inventorier les archives et lui donne matière à éditer nombre d’inventaires, dictionnaires et répertoires sur les richesses archéologiques du département. De 1862 à 1879, aidé de ses équipes il publiera sous son nom une somme impressionnante d’ouvrages érudits.
(voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Maximilien_Quantin).
Parmi la masse des sujets relatés, deux erreurs qui auraient pu, sans les temps troubles de 1870, être rapidement corrigés, s’insinuent dans le :
Répertoire archéologique du département de l’Yonne. 1868. Société des Sciences de l’Yonne.
La première erreur, bénigne, décrit la Pierre Saint-Martin de notre finage comme étant constituée de grès ferrugineux alors qu’elle est en grès blanc.
La pierre Saint-Martin - photo Pierre Glaizal
La seconde erreur, plus malencontreuse, annonce :
Cette appellation sera recopiée à l’infini et fera autorité au point que, les suppliques successives des Amis de la Collégiale pour retrouver notre Pierre premier, induiront le doute parmi les instances culturelles.
A ce jour, seuls le Diocèse d’Auxerre et la DRAC de Dijon ont effectué, les corrections sur leurs sites.
Demeurent circonspects malgré les sources d’archives produites :
La plateforme POP du Patrimoine qui s’obstine à indiquer les deux appellations à la seule raison qu’elles existent sur des documents ! Mais c’est justement ces documents recopiés après la coquille !
L’architecte des Monuments Historiques qui se réfère à la plateforme et met sérieusement en doute la production de nos sources.
Sur notre site :
http://lesamisdelacollegiale.blogspirit.com
16.10.31 Étude du vocable de l'église d'Appoigny.pdf
Nous avons, enfin, réussi à modifier Wikipedia :
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89glise_Saint-Pierre_d%27Appoigny
Mais sans consensus, la situation s’auto-génère, elle continue d’induire en erreur tous les acteurs du Patrimoine.
Les Amis de la Collégiale ont la faiblesse de penser qu’en matière de Patrimoine, la Mémoire est aussi importante que la conservation du monument.